L’atout gagnant pour le développement

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Après des études l’ayant mené à l’étranger, Oriane Carreau a rejoint son papa dans l’exploitation familiale, en y mettant toute son énergie, ses compétences et sa sensibilité. Mais aussi un caractère bien trempé et une réelle envie de réussir en misant sur le savoir-faire de la maison, ses choix culturaux et œnologiques. Convaincue du potentiel de la Côte des Bar, cette dame de cœur tombe à pic pour faire décoller l’activité, notamment à l’export.
 
Nous produisons actuellement 22 000 bouteilles par an, dont 20 % partent au grand export. Avec nos six hectares de vignes, notre potentiel approche les 70 000 bouteilles. Nous irons pas à pas, bien sûr, mais notre objectif, à terme, est de transformer tous nos raisins”, annonce Oriane Carreau, du haut de ses 26 ans. Dans le creuset aubois des récoltants-manipulants qu’est Celle-sur-Ource, cette jeune maman croit en l’avenir et s’investit pleinement pour réussir au côté de son père Lionel. Elle l’a rejoint sur l’exploitation il y a quatre ans en fixant au préalable quelques conditions. “Il fallait que nous soyons totalement raccord tous les deux, que nous puissions jouer de nos complémentarités en nous épanouissant l’un et l’autre dans le métier. J’ai profité de mon année de licence professionnelle Vigne et Vin, en alternance à Dijon et dans la maison paternelle, pour voir si nous étions compatibles”, déclare celle qui craignait un peu le choc des générations. Il n’a pas eu lieu et, au terme de cette année-test, elle n’a donc pas bifurqué vers une autre profession ainsi qu’on pu le faire ses deux sœurs auparavant. Elle s’est inscrite dans une lignée de vignerons, en digne héritière d’aïeux et aïeules que l’on peut voir réunis sur la reproduction grand format d’une carte postale de la vendange datant de 1913. Accrochée au mur dans la salle de réception de la maison, cette photo sépia témoigne qu’à cette époque déjà les femmes étaient très présentes, et actives. Elles apportaient leur pierre à l’édifice et Oriane entend faire de même avec ses atouts et ses convictions. “Je n’ai jamais eu à l’esprit l’idée de vouloir tout révolutionner, prévient-elle assise dans le bureau qu’elle partage avec son père. Nous parlons beaucoup ensemble et nous nous posons toutes les questions pour pousser les projets dans la meilleure entente possible.”
Primée par Elle à table

Orianne Carreau a rejoint son père Lionel pour développer l’exploitation familiale


Son influence est déjà perceptible, notamment dans les choix marketing et communication d’une maison qui fait briller de mille diamants le nom de Lionel Carreau sur ses affiches et outils de com’. “Les femmes peuvent apporter une sensibilité globale à une entreprise viticole plus qu’à la nature même du vin”, estime la jeune femme. Tout en délestant son père des tâches administratives dont il n’a guère le goût, elle s’emploie à faire rayonner l’image de la marque lors des salons et les événements champenois. Elle était notamment présente à l’Instant Champagnes organisé par le SGV à Paris en décembre dernier. Un pop-up store très couru où elle s’est montrée à son aise, parlant l’anglais qu’elle a appris et pratiqué lors de ses études de commerce à Montréal (Canada) et Coventry (Royaume-uni). A chaque fois, elle en profite pour revendiquer le choix de la viticulture raisonnée engagée par son papa il y a quelques années déjà et pour vanter la typicité des cuvées signées Lionel Carreau  élaborées avec l’aide d’une œnologue de Bar-sur-Seine, Emilie Stéphan. Ce dynamisme lui a valu d’être repérée par le magazine Elle à Table qui recherchait des jeunes talents à travers les vignobles de l’Hexagone. “Ils ont pris contact pour que je leur raconte mon histoire et cela a fait tilt. Nous avons eu droit un article — la presse c’est important ! — mais aussi à une participation au concours annuel Elle à Table. Nous y avons décroché la médaille d’or pour notre cuvée Réserve, avec en prime le Trophée 2016 du Meilleur nouveau producteur !”, savoure Oriane. Ce qui ne l’a pas empêché de repartir planter quelques piquets à la barre à mine ou de piloter l’enjambeur dans le cadre de la formation Conduite d’exploitation viticole qu’elle suit à Saint-Pouange pour s’aguerrir sur toutes les facettes du métier. L’œnotourisme en fait partie et elle a quelques idées prometteuses dans ce domaine-là, aussi.

Cap sur l’export

A titre d’exemple, on trouve le champagne Lionel Carreau dans les rayons de Mark & Spencer en Grande-Bretagne, "avec une belle valorisation à la clé", affirme Oriane, désireuse d’aller porter la marque plus loin, avec toujours plus de bouteilles expédiées. "On sait tous que le marché français s’essouffle et qu’il faut gagner des marchés sur d’autres continents pour se développer. Nous avons attaqué l’Asie avec de beaux projets en cours. Des conteneurs sont déjà partis, c’est encourageant", se réjouit-elle. Avec son père, elle a reçu l’importateur asiatique sur l’exploitation pour lui faire découvrir l’intégralité des installations et des moyens humains (trois personnes à temps plein). Il est passé de la cuverie à la salle d’habillage et a pu voir le matériel utilisé dans les vignes. "Il faut jouer la transparence la plus totale, monter nos vignes, nos outils et nos stocks et ne pas faire croire que l’on aura la réactivité et les volumes de production des grandes maisons. Nous travaillons à notre échelle, avec des cuvées ayant de la typicité et il nous faut fournir des explications précises aux acheteurs pour faire nos ambassadeurs. S’ils apprécient nos produits, ils sont plus enclins à nous référencer et à surtout partager leurs connaissances acquises sur nos vins avec les consommateurs dans leur pays." Oriane Carreau entend toujours jouer carte sur table.

Les vieilles vignes ont de l’avenir

Une cinquième cuvée va devoir se trouver une petite place sur l’élégante plaquette qui met en avant les productions de la maison auboise, faisant ressortir les assemblages choisis pour exprimer au mieux le caractère de ce secteur de la Côte des Bar. Il s’agit cette fois d’un… 100 % pinot noir dont les raisins proviennent de vieilles vignes âgées de 50 ans et plus. "Fruit d’un travail parcellaire, notre Blanc de Noirs vieilles vignes, provient d’une parcelle plantée et bichonnée par le papy Henri. On y trouve de beaux gros ceps qui donnent bien. Avec papa, pour élaborer ce vin, nous avons puisé dans nos racines tout en nous inscrivant dans la modernité", lance Oriane, heureuse de cette symbiose. Elle n’hésite pas à vanter les caractéristiques d’une autre cuvée née avant son arrivée et qui fleure bon le terroir de Celles-sur-Ource : Préembulles. "Nous avons la chance que nos prédécesseurs aient conservé des vignes plantées en Pinot Blanc Vrai, lequel vient apporter sa touche de fraîcheur et son peps à cette cuvée très identitaire."

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